Appel à communications

L’expérience d’une même situation ou d’un même phénomène, d’une même épreuve de vie ou encore d’un même problème de santé, peut varier considérablement d’un individu à un autre (Blume, 2017). L’expérience est singulière et personnelle. Mais l’expérience est-elle seulement singulière et personnelle ?

L’expérience est également constituée de faits réputés objectifs et aisément partageables par tous, par exemple : la blouse du masso-kinésithérapeute ou la roue du fauteuil. L’expérience comprend aussi tous les apprentissages intériorisés depuis le plus jeune âge qui ont permis à l’individu de vivre dans une réalité partagée avec les autres. L’acquisition des couleurs, de la variété des textures des matières, du langage, des valeurs et des normes, etc. ne s’est pas faite de façon autonome mais en relation avec les autres. Le rapport au monde, à soi et à autrui a été appris et construit (Berger & Luckmann, 1966). L’expérience continue au présent à être innervée par de nombreux savoirs glanés dans les rencontres avec d’autres individus, au cours du visionnage de documentaires ou de lectures, dans la rencontre avec des professionnels, médecin ou travailleur social, etc. L’expérience individuelle est donc fondée sur tout un ensemble de sources qui dépasse de loin la seule personne qui la vit. Une autre façon de résumer le propos pourrait être celle-ci : l’expérience personnelle est largement construite sur des savoirs intersubjectifs et partagés (Berger & Luckmann, 1966), sur le sens commun.

Un tournant dans la façon de prendre en compte l’expérience dans le champ des sciences humaines et sociales s’est opéré dans les années 1980-90 (Prior, 2003). Les travaux portaient jusqu’alors essentiellement sur les croyances profanes ou encore sur les représentations sociales, notamment en santé. Depuis, de nombreuses recherches et publications se sont intéressées aux savoirs et expertises profanes (Prior, 2003). Plus récemment encore, les publications scientifiques ont cessé de désigner ces savoirs sur la base de leur extériorité aux sciences. De profanes, ils sont devenus « savoirs expérientiels » (Borkman, 1976). Ils désignent le plus couramment des savoirs issus d’expérience de vie avec la maladie chronique, avec un trouble de santé mentale ou bien l’expérience d’une situation de handicap, mais aussi d’autres expériences rares telles certaines migrations, la grande pauvreté, la vie à la rue, etc.). Ce sont de ces expériences que peuvent être issues les savoirs rares qui nous intéressent.

Depuis les années 2010 en France, les savoirs expérientiels rares intéressent les secteurs professionnels et le champ politique. De nombreuses expérimentations sont aujourd’hui en cours au niveau local et national. Cette mise en œuvre de l’usage des savoirs expérientiels rares repose sur de nombreuses évidences qui sont peu interrogées (Blume, 2017). Tous ces savoirs sont-ils utiles ? Tous sont-ils pertinents ? Tous sont-ils valides ?

En outre, de nombreux problèmes pratiques se posent. Au niveau individuel tout d’abord. Le savoir expérientiel d’un seul permet-il de parler au nom d’une communauté de pairs ? Comment choisir celui qui représentera ses pairs ? Et au nom de quoi ? Les savoirs expérientiels d’un individu peuvent entrer en contradiction avec ceux d’un autre vivant pourtant une situation similaire. Faut-il départager les savoirs expérientiels personnels ? Et si oui, sur quels critères ? Ou au contraire doit-on considérer que tous les savoirs expérientiels ont fondamentalement la même valeur ? Qu’ils ne valent de façon certaine que pour une seule personne ?

Cette question de départager les savoirs expérientiels se pose également au niveau collectif. Peut-on affirmer qu’un groupe de pairs auraient davantage de savoirs expérientiels qu’un autre ? Ou bien peut-on affirmer que les savoirs expérientiels des uns seraient plus utiles, pertinents ou valides que ceux des autres ? Peut-on affirmer que les savoirs expérientiels des personnes directement concernées seraient plus pertinents que ceux de leurs proches, ou l’inverse ?  Et si cela n’était pas possible, comment faire quand les savoirs expérientiels des uns et des autres impliquent des actions contradictoires ?

Enfin, cette même question se pose également au niveau organisationnel ou politique. Sur quels savoirs expérientiels peut-on s’appuyer pour améliorer la qualité d’une offre ou penser une politique publique ? Des mises en concurrence des savoirs expérientiels ont été constatées. Des publications scientifiques montrent même que des lobbies industriels dans le champ de la santé agissent pour favoriser l’émergence ou au contraire diminuer l’influence de mouvements de patients (O’Donovan, 2007 ; Rothman et al., 2011).

Aussi est-il important aujourd’hui d’ouvrir ce débat : de quels savoirs expérientiels avons-nous besoin ? Plus précisément, nous nous intéresserons à comprendre ce qu’apportent les savoirs expérientiels personnels, collectifs ou pairjectifs (Gardien, 2020). Que permettent-ils de faire ? Par qui ? Et pour qui ?

 

Axes thématiques pour contribution scientifique :

Cet appel à communication s’intéresse aux savoirs expérientiels rares des personnes directement concernées, mais aussi à ceux des professionnels ou des proches-aidants.

Dans le cadre de ce colloque, nous invitons les participants à discuter les axes suivants :

Axe 1 - Qu’apportent les savoirs expérientiels personnels ? Et à qui ?

Axe 2 - Qu’apportent les savoirs expérientiels collectifs ? Et à qui ?

Axe 3 - Qu’apportent les savoirs expérientiels pairjectifs ? Et à qui ?

Pour les axes 1, 2 et 3, nous sommes intéressés par des travaux répondant à ces questions, à la lumière de données issues d’enquêtes portant sur :

    • La vie quotidienne d’individus directement concernés ou leurs proches
    • Des accompagnements ou des soutiens par les pairs
    • Des activités politiques ou militantes
    • Des activités de loisirs
    • Le soin, la réadaptation, la réhabilitation ou encore l’accompagnement social
    • Des activités pédagogiques, de formation ou d’enseignement
    • La conception ou l’amélioration de biens et de services
    • Des activités de promotion, de prévention, d’éducation et de sensibilisation à la santé
    • Des activités professionnelles
    • D’autres contextes encore.

Axe 4 - Que permettent de faire les savoirs expérientiels personnels ? Par qui ? Et pour qui ?

Axe 5 - Que permettent de faire les savoirs expérientiels collectifs ? Par qui ? Et pour qui ?

Axe 6 - Que permettent de faire les savoirs expérientiels pairjectifs ? Par qui ? Et pour qui ?

Pour les axes 4, 5 et 6, nous sommes intéressés par des travaux répondant à ces questions, à la lumière de données issues d’enquêtes portant sur :

    • La vie quotidienne d’individus directement concernés ou leurs proches
    • Des accompagnements ou des soutiens par les pairs
    • Des activités politiques ou militantes
    • Des activités de loisirs
    • Le soin, la réadaptation, la réhabilitation ou encore l’accompagnement social
    • Des activités pédagogiques, de formation ou d’enseignement
    • La conception ou l’amélioration de biens et de services
    • Des activités de promotion, de prévention, d’éducation et de sensibilisation à la santé
    • Des activités professionnelles
    • D’autres contextes encore.

Axe 7 – Quels sont les effets de la valorisation ou de la priorisation de certains savoirs expérientiels et non d’autres ?

Axe 8 – Quels sont les savoirs expérientiels ignorés ? Par qui ? Avec quels effets ?

Modalités de soumission de contribution scientifique

Communication personnelle

Symposium (session thématisée de 3 communications)

Votre proposition de communication sera déposée sur SciencesConf pour évaluation. Merci de préparer :

vos nom, prénom et titre

Institution

Résumé (problématisation, méthodologie, résultats, bibliographie) : 2 500 signes maximum

Mots-clefs

Soumettre sa contribution scientifique

 

Axes thématiques pour contribution citoyenne

Ce colloque EXPAIRs ouvre un forum citoyen sur la thématique des savoirs expérientiels personnels, collectifs ou pairjectifs. Il s’agit d’un cadre d’expression ne nécessitant pas la maîtrise des normes scientifiques de production de la connaissance.

Cet appel s’adresse aux personnes directement concernées, aux professionnels, aux proches, aux associations qui souhaiteraient faire part de leur réflexions et analyses concernant leur utilisation ou mobilisation d’un ou plusieurs savoirs expérientiels (issus de l’expérience de la maladie, de situations de handicap, de troubles de santé mentale, de l’addiction, de la vie à la rue, etc.)

Axe 1 – Quelle forme prend votre savoir expérientiel personnel (témoignage, anecdote, contenu de formation, propositions ou questions à votre pair, autobiographie, etc.) ? Et pourquoi ?

Axe 2 – Quelle forme prend votre savoir expérientiel collectif (témoignage, séance de sensibilisation, contenu de formation, etc.) ? Et pourquoi ?

Axe 3 – Dans quels espaces sociaux et comment avez-vous co-construits vos savoirs personnels ?

Axe 4 - Dans quels espaces sociaux et comment avez-vous co-construits vos savoirs collectifs ?

Pour les axes 1, 2, 3 et 4, nous sommes intéressés par des contributions portant leur analyse sur les domaines de vie ou de pratique suivants :

    • Domaine du soutien et de l’accompagnement par les pairs
    • Domaine du soin ou de l’accompagnement social
    • Domaine de l’accompagnement par les proches
    • Domaine de la formation ou de l’enseignement
    • Domaine de la conception de biens et services
    • Domaine de la conception de l’aménagement d’espaces privés ou publics
    • Domaine de l’élaboration des politiques publiques
    • Domaine de la représentation des usagers, de la médiation ou de la défense des droits

Axe 5 - En tant que soignant, à quel moment dans une trajectoire de soin, dans quels objectifs, proposez-vous à votre patient d’avoir recours aux savoirs expérientiels de personnes ayant connu une expérience de la maladie ou du handicap proche de la sienne ?

Axe 6 - En tant qu’intervenant social, à quel moment dans un accompagnement, dans quels objectifs, proposez-vous à la personne d’avoir recours aux savoirs expérientiels d’individus ayant connu une expérience de la maladie ou du handicap proche de la sienne ?

Axe 7 - En tant qu’aidant, à quel moment de sa vie, dans quels objectifs, avez-vous proposé à votre proche d’avoir recours aux savoirs expérientiels de personnes ayant connu une expérience de la maladie ou du handicap proche de la sienne ?

Axe 8 – En tant que professionnel ou aidant, comment avez-vous distingué un pair qui a vous semblé suffisamment fiable pour pouvoir orienter un patient, une personne accompagnée ou un proche vers lui ? Quels gages attendez-vous en termes de sécurité et de pertinence concernant l’aide apportée ?

 

Modalités de soumission contribution citoyenne

Votre proposition de contribution sera déposée sur SciencesConf pour évaluation. Merci de préparer :

vos nom et prénom / le collectif : nom du collectif + noms et prénoms de ses membres

Résumé de l’analyse (les idées les plus importantes + les grandes étapes du raisonnement + préciser de quel savoir expérientiel il est question) : 2 500 signes maximum

Mots-clefs

Domaine de vie ou de pratique concerné par votre contribution

Soumettre sa contribution citoyenne

 

Déroulé de l’évaluation (étapes et dates)

Lancement AAC début novembre

Réception des propositions : 29 janvier 2023

Retour des évaluations : fin février 2023

Envoi des diaporamas : 18 mai 2023

 

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